Jean Démosthène Dugourc
Les travaux de recherche relativement récents publiés entre 1989 et 2000 par Luis Belhaouari, Christian Baulez et Chantal Gastinel-Coural ont permis de mieux connaître la brillante personnalité de Jean Démosthène Dugourc11. Baulez 1990, Gastinel-Coural 1990 ; voir aussi la notice biographique de J. D. Dugourc dans cat. exp. Paris 1991, p. 521, et, sur son activité dans le domaine de l’estampe : Luis Belhaouari, « Jean-Démosthène Dugourc graveur de Sacrifice à Vénus, d’après un tableau de Caspar Netscher anciennement dans les collections du Palais Royal », Nouvelles de l’estampe, no 170, mai-juin 2000, p. 26-34.. Fils d’un contrôleur de la maison du duc d’Orléans, l’homme prétend avoir été élevé au côté du duc de Chartres, sous les meilleurs maîtres ; mais ce qu’il rapporte dans ses écrits autobiographiques mérite examen22. Anatole de Montaiglon, « Autobiographie de Dugourc », Nouvelles archives de l’art français, 1877, p. 367-371 ; Baulez 1990, p. 11.. Son talent de dessinateur ne fait en revanche aucun doute ; il doit beaucoup à l’un des Saint-Aubin (on ne sait précisément lequel), qui fut son maître. Beau-frère de François Joseph Belanger, dessinateur du cabinet de Monsieur (le futur Louis XVIII), dessinateur des costumes de l’Opéra de Paris (1783) et du Garde-Meuble de la Couronne (1784), intendant des bâtiments du comte de Provence, il travailla pour la maison Pernon et créa ses propres manufactures (successivement de papier peint, de cartes à jouer, puis de cristaux) ; en 1800, il passait au service du roi d’Espagne. Après son retour en France, il exerça son art dans le cadre des cérémonies publiques sous la Restauration et retrouva la charge de dessinateur du Garde-Meuble de la Couronne. Les décors de la salle du Trône aux Tuileries constituent alors son principal ouvrage.
Autre aspect moins en vue de son activité, Dugourc fut occasionnellement illustrateur (pour les Contes de La Fontaine, 1795, ou pour Les Incas de Marmontel et Atala de Chateaubriand)33. Portalis & Béraldi 1880-1882, t. II, p. 64. et toucha aussi à l’histoire nationale. La vente du fonds Tassinari-Chatel, en 1988, a fait apparaître Saint Louis prisonnier et Saint Louis enterre les morts à Ptolémaïs (paire de dessins, no 166), Mathieu de Montmorency épouse l’héritière de Laval (no 168) ou encore Charles Quint ramasse le pinceau du Titien (no 169). D’emblée, on notera dans ces simples esquisses qu’à côté de moments fameux, surtout en ce qui concerne la vie des grands maîtres, se glissent des épisodes beaucoup moins en vue.
C’est principalement dans les débuts de sa carrière que Dugourc aborda ce type de sujet anecdotique, comme en témoignent trois dessins conservés dans les fonds de l’École nationale supérieure des beaux-arts : Le Souper d’Henri IV à Coutras (1775), Léonard de Vinci mourant dans les bras de François Ier (1776) et L’Hommage rendu au maréchal de Catinat après la bataille de La Marsaille (1777). Pour Luis Belhaouari, dans ces œuvres dont il a souligné l’intérêt, « la reconstitution historique n’est pas un effet de style, c’est une exigence44. Belhaouari 1992, p. 76. ».
Attaché à la légende alors triomphante du Vert-Galant, Dugourc lui consacrera encore quelques compositions comme Henri IV et Gabrielle et, plus indirectement, La Poule au pot (d’abord intitulée Trait de bienveillance de Marie-Antoinette), gravée par François Anne David (1774-1775)55. Brière 1910, p. 316 ; IFF, xviiie siècle, t. VI (Marcel Roux, 1949), p. 139-140, no 13..