Projet d’illustration pour La HenriadeJean-Michel Moreau, dit Moreau le Jeune
Projet d’illustration pour La Henriade
Jean-Michel Moreau, dit Moreau le Jeune (Paris, 1741 – Paris, 1814)
Inv. P. 97.1.1
1775
Plume, encre grise, encre brune, lavis brun sur traces de graphite, papier vergé ivoire
H. 13 ; L. 8,5 cm
Inscription en bas à droite, à l’encre brune : J.M. Moreau Lejeune 1775
Acquis sur le marché de l’art à Nantes en 1997 (arrêté du 7 avril 1997).
Marie-Joseph François Mahérault (anagramme de Armeilhaut), L’Œuvre de Moreau-le-Jeune. Catalogue raisonné et descriptif [...], Paris, Labitte, 1880, p. 297, et p. 500, no 567.
Emmanuel Bocher, Les gravures françaises du xviiie siècle ou Catalogue raisonné des estampes [...] de 1700 à 1800, VIe fascicule, Jean-Michel Moreau le Jeune, Paris, Morgand et Fatout, 1882, p. 582, 586, 702, 715.
Juliette Rigal, Catalogue des éditions illustrées de la Henriade au xviiie siècle, Bulletin de la Société des amis du château de Pau, nouvelle série, nos 105-106-107, 4e trimestre 1986 – 1er et 2e trimestres 1987, p. 44-46.
O. R. Taylor (éd.), La Henriade, 2e éd., 1970, Les Œuvres complètes de Voltaire, éd. Theodore Besterman, puis William Henry Barber, Genève, Institut et musée Voltaire,
puis Oxford, Voltaire Foundation, 1968-, II, 1970, p. 480.
Voltaire et Henri IV, cat. exp. (Pau, musée national du Château, 27 avril – 30 juillet 2001), Paris, Réunion
des musées nationaux, 2001, p. 53-54.
Les qualités d’exécution de cet Henri IV sur son char de triomphe – de beaux effets
de lumière et de réserve, un emploi du lavis bien en harmonie avec toute une part
de l’œuvre de Moreau le Jeune – et sa date assez précoce par rapport à l’ensemble
des illustrations de l’édition de Kehl de La Henriade (1784-1789) signalent ce dessin isolé comme un projet sans lendemain destiné au poème
épique de Voltaire. Quoique proche de la grande figure retenue pour le chant V de
cette édition (fig. 49 a), il ne fut suivi que d’une eau-forte de même format (fig. 49 b).
Les parentés formelles avec les scènes gravées pour l’édition des œuvres du philosophe
sont pourtant indiscutables. Au chant V (v. 265-268) de l’épopée, l’orage interrompt
le sacrifice des Seize aux esprits infernaux et laisse surgir Henri IV, en une vision
qui terrorise les conspirateurs :Au milieu de ces feux, Henri brillant de gloire
Apparaît à leurs yeux sur un char de victoire.
Des lauriers couronnaient son front noble et serein,
Et le sceptre des rois éclatait dans sa main
Ce feu qui embrase Paris, la lumière qui disperse d’épais nuages, l’allure même de
ce char et la posture qu’y prend le roi triomphateur au front ceint de laurier, sa
fraise tuyautée, touche de clair et de pittoresque sur l’armure brillante, et même
la disposition des autres personnages, se superposent bien à l’illustration connue.
Mais, au total, le compte, ou plutôt le sens, n’y est pas. Ici, le peuple acclame
un sauveur qui met en déroute ses ennemis, précédé par la Renommée armée d’une trompette :
l’allégorie l’emporte et donne une portée plus générale au propos ; là, l’identification
plus littérale, ce retour au texte qui constitue l’un des traits marquants de la première
suite de Moreau le Jeune, ne permet plus de perdre de vue le contenu du poème. Le
sacrifice des inspirateurs de la Ligue incarnés par les Seize, qui constitue une référence
précise à l’un des passages les plus dramatiques de l’argument, manque à notre dessin
de 1775. Il pourrait s’agir en fin de compte d’un projet de frontispice pour La Henriade. On aurait alors utilisé ce projet dans une transposition partielle pour en tirer
l’illustration du chant V.
Moreau le Jeune avait commencé les dessins de La Henriade bien avant la commande pour l’édition de Kehl : les résultats de cette recherche
peuvent être constatés dès 1781 au Salon, où l’on expose (no 308) « plusieurs dessins in-4o, sujets de la Henriade qui formeront la première livraison des estampes proposées
par souscription, pour l’ornement des Editions de M. de Voltaire ». De cette anticipation
du travail sur l’achèvement de la commande, on peut aussi déduire l’éventualité de
plusieurs états de recherche. En 1783 était ainsi vendu un « dessin à la plume et
lavé au bistre sur papier blanc [...] 1775 », indication trop brève pour établir un
lien suffisamment solide avec l’œuvre acquise par le château de Pau.
À quelques années du « triomphe de Voltaire » à Paris (30 mars 1778) et de la représentation
qu’en donna Moreau le Jeune, voici celui d’un Henri IV très spectaculaire, couronné
de laurier, s’élançant dans les airs sur son char et chassant ses ennemis devant un
parterre de Parisiens émerveillés...
Technique associée : Estampe, illustration
Type de représentation : Allégorie
Index des sources : Henriade
Étapes de publication :
P. Mironneau, Cl. Menges, 11 décembre 2007, rédaction de la notice pour première publication.
Pour citer cet article :
P. Mironneau, Cl. Menges, « Projet d’illustration pour La Henriade » dans Catalogue des dessins musée national du château de Pau, mis en ligne le 11 décembre 2007. https://dessinsdepau.fr/notice/notice.php?id=49
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