Paul Mironneau et Claude Menges-Mironneau
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Portrait d’Abdelkader
Attribué à Charles François Adolphe Eynard

Illustration de comparaison
FIG. 156 a. Jules Hébert (1812-1897), d’après Charles Eynard. Abdelkader. Lithographie. Genève, musée d’Art et d’Histoire, cabinet des Estampes
Inscriptions

Annotations au dos de l’ancien montage, au crayon : portrait d’Abd-el-Kader d’après nature dessiné durant sa détention à Pau par mon père Pierre Schlumberger

Historique

Collection Schlumberger : legs Schlumberger au musée des Beaux-Arts de Pau.
Dépôt au château de Pau, 25 février 1954.

Bibliographie

Gustave Schlumberger, Mes Souvenirs 1844-1920, Paris, Plon, 1934, t. I.
Paul Mironneau, « Mémoire, légende. Brève anthologie paloise sur la captivité d’Abdelkader », in Claude Menges & Paul Mironneau (sous la dir. de), À propos d’Abdelkader, en hommage au plus illustre prisonnier du château de Pau, Pau, éditions du Pin à crochets, 1998, p. 55-59, repr. p. 58.
Cat. exp. Pau 1998, p. 119.
Mironneau et Verdenal 2007, p. 82-84.

Exposition

Pau 1990, no 42.
Pau 1998.

Observations

À l’issue de sa reddition volontaire au général Lamoricière le 23 décembre 1847 et après un dur séjour au fort Lamalgue à Toulon, Abdelkader, prisonnier du gouvernement français en dépit de la parole donnée, fut six mois durant, du 29 avril au 2 novembre 1848, contre son gré, résident du château Henri IV11. Voir également les notices cat. exp. Paris 2003, p. 186-188, et Paul Mironneau, « Abdelkader au château de Pau », dans Mémoire et destin d’Abdelkader : image et politique (actes de la journée d’étude du 21 juin 2003), à paraître dans le BSACP en 2007. Nous remercions très chaleureusement Ahmed Bouyerdene, qui prépare une thèse de doctorat sur la captivité d’Abdelkader en France et nous a donné en outre de très précieuses indications tirées de la correspondance inédite de Charles Eynard.. Dans un parcours aussi riche22. Référence ancienne mais devenue classique, Bernasconi 1971 illustre bien ce silence. À compléter avec quelques précautions par Beaugé 1998., historiens et iconographes se sont peu attardés sur cette étape pourtant cruciale. Entre les lithographies publiées avant 1847, dans une décennie de confrontation (qui parfois se teinte de séduction), et les images de plus en plus nombreuses qui marqueront le séjour au château d’Amboise, où Abdelkader fut acheminé à son départ de Pau, une nouvelle iconographie prend naissance. Un artiste amateur suisse qui séjournait aux Eaux-Bonnes, le Genevois Charles Eynard, neveu du philhellène Jean-Gabriel Eynard et lui-même fils d’une artiste, Suzanne Élisabeth Eynard-Châtelain, réussit à effectuer un portrait, passant sur les réticences des autorités françaises. L’homme a réellement fréquenté l’Émir, qu’il a rencontré dès le 5 mai 1848 ; il lui a offert plusieurs exemplaires de la Bible traduite en arabe, et longtemps après ces événements, Abdelkader et Charles Eynard continueront de correspondre et de partager une expérience spirituelle de grande intensité.
Divers témoignages font allusion à ce portrait. Ainsi le manuscrit de l’archéologue et artiste (lui aussi amateur) Gustave Houbigant (1790-1862)33. Journal de voyage de Paris aux Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées) en allant par Orléans, Tours, Poitiers, Bordeaux et Pau ; revenant par Pau, Tarbes, Périgueux, Limoges et ChâteauRoux, fait en 1841 par M. et Mme Houbigant et Melle Louise Leuillier, Pau, bibliothèque municipale, ms 124 ; voir Bouyssi 1961 et Gaston 1975, p. 256., riche de souvenirs et de curiosités. Le portrait d’Abdelkader y figure sous la forme d’une petite lithographie découpée et fait l’objet d’un long commentaire44. Manuscrit de Gustave Houbigant (titre complet cité note ci-dessus), p. 99-101.. Eynard, « placé secrètement », selon Houbigant, dans un cabinet voisin de l’appartement de l’Émir, aurait pris le croquis… Dans ses souvenirs d’enfance, l’historien et numismate Gustave Schlumberger cite aussi le portrait d’Abdelkader. Or, notre dessin, qui appartient au fonds Schlumberger du musée des Beaux-Arts de Pau, a été attribué au père de l’historien, Pierre Schlumberger, sur la foi d’une annotation portée sur un montage aujourd’hui disparu ; mais ce seul témoignage figuré de l’Emir pour la période paloise coïncide de trop près avec l’ouvrage de Charles Eynard55. Schlumberger 1934, t. I, n. p.. On sait aussi que les familles Eynard et Schlumberger, ardents protestants d’obédience darbyste, entretenaient des liens très étroits ; il semble dès lors parfaitement légitime de formuler une autre hypothèse : le dessin conservé par les Schlumberger pourrait fort bien être de la main de Charles Eynard. Lithographiée par le Suisse Jules Hébert (Genève, 1812 – Plainpalais, 1897), qui fut élève d’Ingres (fig. 156 a), il accompagnera les efforts de son auteur en faveur de la libération du prisonnier injustement retenu. « Je prends la liberté, écrit Charles Eynard à la fin de sa lettre du 18 avril 1849 à Émile Ollivier, de vous adresser un exemplaire du portrait d’Abd-el-Kader que j’ai fait faire pour ses amis66. Aire 1900, p. 147.. »
Le modeste mais pénétrant crayon d’un amateur averti jaillit d’un milieu intensément religieux, frotté d’art et fort cultivé. Il retient les traits de douceur et de bonté qui ont marqué l’auteur et que celui-ci rappelle à plusieurs reprises dans sa correspondance. Ce n’est pas une œuvre voyante, mais nous lui trouvons une grande élégance.

1. Voir également les notices cat. exp. Paris 2003, p. 186-188, et Paul Mironneau, « Abdelkader au château de Pau », dans Mémoire et destin d’Abdelkader : image et politique (actes de la journée d’étude du 21 juin 2003), à paraître dans le BSACP en 2007. Nous remercions très chaleureusement Ahmed Bouyerdene, qui prépare une thèse de doctorat sur la captivité d’Abdelkader en France et nous a donné en outre de très précieuses indications tirées de la correspondance inédite de Charles Eynard.
2. Référence ancienne mais devenue classique, Bernasconi 1971 illustre bien ce silence. À compléter avec quelques précautions par Beaugé 1998.
3. Journal de voyage de Paris aux Eaux-Bonnes (Basses-Pyrénées) en allant par Orléans, Tours, Poitiers, Bordeaux et Pau ; revenant par Pau, Tarbes, Périgueux, Limoges et ChâteauRoux, fait en 1841 par M. et Mme Houbigant et Melle Louise Leuillier, Pau, bibliothèque municipale, ms 124 ; voir Bouyssi 1961 et Gaston 1975, p. 256.
4. Manuscrit de Gustave Houbigant (titre complet cité note ci-dessus), p. 99-101.
5. Schlumberger 1934, t. I, n. p.
6. Aire 1900, p. 147.
Index

Artiste cité : Schlumberger (Pierre)

Technique associée : Estampe, illustration

Type de représentation : Portraits

Autre personnage : abd el-Kader

Index géographique et monumental : Pau, château et ville

Copyrights

Étapes de publication :
P. Mironneau, Cl. Menges, 11 décembre 2007, rédaction de la notice pour première publication.

Pour citer cet article :
P. Mironneau, Cl. Menges, « Portrait d’Abdelkader » dans Catalogue des dessins musée national du château de Pau, mis en ligne le 11 décembre 2007. https://dessinsdepau.fr/notice/notice.php?id=156
© Réunion des musées nationaux – Grand Palais et musée national et domaine du château de Pau, 2024

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