Cat. 214
1835
Dessin formé par l’assemblage de différents morceaux de papier ; pinceau, encre et lavis noirs, aquarelle, rehauts de blanc, gomme arabique, encadrement au crayon ; papier ivoire collé sur papier bleu
H. 24,5 cm ; L. 17,9 cm
Signé et daté en bas à gauche, à l’encre noire : R. F. 1835
Joseph Nicolas Robert FLEURY, dit ROBERT-FLEURY
Henri IV rapporté au Louvre après son assassinat fut présenté au Salon de 1836 ; le livret précise (no 1584) : « Le roi ayant été assassiné rue de la Ferronnerie, la voiture rentre au Louvre. – Le duc d’Epernon fait prendre le corps d’Henri IV par quelques valets de pied et le fait porter dans les appartements (Mémoires du temps) ». Les derniers instants du roi sollicitent plus spécialement l’attention d’un artiste qui, selon l’expression d’Ernest Chesneau en 1868, éprouve une prédilection pour les « épisodes sévères de l’histoire1 ».
Le critique de L’Artiste, en 1836, attache les mêmes éloges à Henri IV rapporté au Louvre, tableau à ce jour non localisé : « son drame est bien conçu, bien exposé. Le roi assassiné, ramené dans son palais, est porté dans ses appartemens par quelques serviteurs. Le silence et la stupeur règnent dans les vastes salles du Louvre ». Dans le Henri IV d’Adolphe Mathurin de Lescure (Paris, Ducrocq, 1874), Léopold Flameng (1833-1911) semble avoir utilisé un état préparatoire (celui-ci peut-être ?) pour illustrer la mort du roi (pl. 10) : image destinée à rejoindre (avec la Naissance de Henri IV de Devéria, l’Entrée de Henri IV dans Paris de Gérard, qui figurent dans le même ouvrage) toutes celles qui auront contribué à nourrir cet apprentissage couplé des grandes heures de la France et d’une esthétique de la scène picturale tout à la fois ample et pittoresque, animée et recueillie. Pour certains contemporains de l’artiste, cependant, la tonalité dramatique ne serait pas assez intensément ressentie : « la figure » d’Henri IV mort « est noble et touchante ; mais ce n’est pas assez ; on la voudrait sublime » (L’Artiste, 1841, t. I, p. 130).
L’étape graphique d’un travail jugé, donc, éminemment honorable, réserve un aperçu saisissant des dispositions de l’auteur. Si l’importance structurante de l’architecture se manifeste pleinement à ce stade précoce de la composition, l’effet des tonalités traduit l’une des particularités les plus saillantes des tableaux de Robert-Fleury : la scène semble close dans une présentation opaque. Et, déjà, les couleurs paraissent « calcinées », pour reprendre la comparaison chère à Théophile Gautier. À gauche, le duc d’Épernon, particulièrement loué dans le tableau du Salon de 1836 (« ce qu’il y a de plus réussi dans cette peinture est sans contredit le personnage du duc d’Épernon, qui, en proie à une vive anxiété, accompagne le corps de son maître, frappé sous ses yeux ») : belle et inquiétante silhouette, dans sa tragique résignation.
Note
Auteurs : P. Mironneau, Cl. Menges
© Réunion des musées nationaux – 2007